La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) est un dispositif fiscal qui impacte significativement la gestion patrimoniale des contribuables les plus aisés en France. Introduite en 2011 et appliquée depuis 2012, cette mesure vise à accroître la contribution des hauts revenus au redressement des finances publiques. Son impact sur le patrimoine est multidimensionnel et mérite une analyse approfondie pour en saisir toutes les implications.
La « taxe Sarkozy » comme elle était surnommée à son origine, s'applique aux foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence (RFR) dépasse certains seuils, créant ainsi une strate supplémentaire d'imposition pour les contribuables les plus fortunés.
CEHR : qu’est-ce que la contribution exceptionnelle complémentaire à l’impôt sur le revenu ?
La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, connue sous le nom de CEHR, est un impôt complémentaire à l’impôt sur le revenu (IR). Il s’agit d’une contribution tournée directement vers les contribuables ayant le plus haut niveau de revenus.
Vous pouvez devenir redevable de la CEHR si vos revenus salariés ou non augmentent, mais aussi dans le cas de la réalisation de certains événements exceptionnels sur le plan financier. Ils peuvent entraîner une augmentation ponctuelle du revenu fiscal de référence. Ces événements peuvent inclure :
- La cession d'une entreprise ;
- Un départ à la retraite avec versement d'indemnités ;
- Une plus-value immobilière importante ;
- La perception d'un revenu exceptionnel (prime, bonus, etc.).
La CEHR exerce une influence significative sur les stratégies patrimoniales, les revenus du patrimoine et la valorisation des actifs. Il est important, si vous êtes concerné, de comprendre pleinement l'impact de cette imposition supplémentaire, pour vous permettre éventuellement de réorienter votre stratégie et de mieux définir vos placements cibles.
Car certes, il existe des solutions pour lisser la perception de certains revenus, et ainsi réduire voire annuler le paiement de la CEHR. Mais c’est, en complément, une stratégie complète d’investissement qu’il faut avoir, pour éviter une taxation élevée.
Qui doit payer la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ?
La CEHR est pensée pour cibler les ménages qui ont des revenus élevés. Plus précisément, ce sont les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence (RFR) dépasse 250 000 € pour une personne célibataire, veuve, séparée ou divorcée. Ce RFR est de 500 000 € pour les personnes mariées / pacsées, avec une imposition commune.
On distingue 2 tranches : 3% puis 4% dès 500 000 € pour une personne seule. 3 % également pour les couples qui, eux, basculent à 4% au-dessus du million d’euros.
Le nombre de ménages assujettis à cet impôt est estimé à 65 000 aujourd'hui. Un nombre qui a triplé depuis la mise en place du dispositif en 2012 (sur les revenus 2011).
Les niveaux de contribution
Voici le tableau des taux applicables selon le revenu fiscal de référence et la situation de famille.
Taux pour une personne seule
| Taux pour un couple soumis à imposition commune
| |
Jusqu'à 250 000 €
| 0 % | 0 %
|
Entre 250 001 € et 500 000 €
| 3 %
| 0 %
|
Entre 500 001 € et 1 000 000 €
| 4 %
| 3 %
|
Plus de 1 000 000 €
| 4 %
| 4 %
|
Voici 3 exemples pour comprendre comment est calculée cette contribution exceptionnelle.
Exemple 1 : Un contribuable célibataire dont le revenu fiscal de référence est de 750 000 €
- Pour la tranche de 250 001 € à 500 000 € : (500 000 – 250 000) x 3% = 7 500 €
- Pour la tranche de 500 001 € à 750 000 € : (750 000 – 500 000) x 4% = 10 000 €
Total : 7 500 € + 10 000 € = 17 500 €
Le contribuable sera redevable d'une contribution égale à 17 500 €.
Exemple 2 : Un couple marié soumis à imposition commune avec un revenu fiscal de référence de 1 500 000 €
- Pour la tranche de 500 001 € à 1 000 000 € : (1 000 000 – 500 000) x 3% = 15 000 €
- Pour la tranche supérieure à 1 000 000 € : (1 500 000 – 1 000 000) x 4% = 20 000 €
Total : 15 000 € + 20 000 € = 35 000 €
Le couple sera redevable d'une contribution égale à 35 000 €.
Exemple 3 : Un contribuable célibataire dont le revenu fiscal de référence est de 2 200 000 €
- Pour la tranche de 250 001 € à 500 000 € : (500 000 – 250 000) x 3% = 7 500 €
- Pour la tranche de 500 001 € à 1 000 000 € : (1 000 000 – 500 000) x 4% = 20 000 €
- Pour la tranche supérieure à 1 000 000 € : (2 200 000 – 1 000 000) x 4% = 48 000 €
Total : 7 500 € + 20 000 € + 48 000 € = 75 500 €
Le contribuable sera redevable d'une contribution égale à 75 500 €.
Il est possible de lisser l’imposition si vous êtes redevable de la CEHR, si vos revenus sont jugés exceptionnels par leur montant et/ou leur caractère. Pour cela, l’administration fiscale met à votre disposition le mécanisme du quotient (lire ci-après).
Conseil de Matthieu
Tous les détails législatif relatifs au CEHR sont à consulter sur la page officielle du Bofip-Impôts n°BOI-IR-CHR-20170711 relatif à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.
La hausse d’impôt exceptionnelle complémentaire
Maintenant que vous connaissez la CEHR, laissez moi vous présenter la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR). Il s’agit d’une nouvelle mesure fiscale proposée par le gouvernement Barnier en 2024, visant à assurer une participation plus équitable des personnes les plus aisées au redressement des finances publiques.
Cette initiative s'inscrit dans la continuité de la CEHR mais va plus loin en cherchant à établir un taux d'imposition minimum de 20 % pour les contribuables les plus fortunés. En clair, chaque ménage imposé en France soumis à la CEHR doit, avec ce mécanisme de la CDHR, atteindre un taux minimum d’imposition de 20 %. Cela vise à briser les mécanismes de défiscalisation les plus complexes. Cette contribution est pensée pour créer un « filet de sécurité » fiscal, empêchant les plus hauts revenus de bénéficier d'un taux d'imposition effectif trop faible par rapport à leurs moyens réels.
La CDHR cible spécifiquement les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence (RFR) dépasse 250 000€ pour un célibataire ou 500 000€ pour un couple (les mêmes règles que la CDHR), et dont le taux moyen d'imposition actuel est – vous l’avez compris – inférieur à 20%. L'objectif est de combler l'écart entre leur taux d'imposition effectif et ce seuil de 20%.
Initialement, on estimait que cette mesure toucherait environ 65 000 ménages, soit 0,3 % des contribuables français. Cependant, des précisions intervenues début octobre 2024 ont réduit ce nombre à environ 24 300 foyers qui seront effectivement redevables de cette nouvelle contribution.
La CDHR est prévue pour s'appliquer aux revenus des années 2024, 2025 et 2026, avec un objectif de générer 2 milliards d'euros de recettes supplémentaires par an.
La CDHR, comme la CEHR, participe de la volonté politique de renforcer la justice fiscale et de faire participer les plus fortunés.
Comment fonctionne le mécanisme de lissage de la contribution exceptionnelle ?
Pour les foyers fiscaux qui deviennent soumis à la CEHR pour la première fois, il est possible d’utiliser un système de lissage, appelé mécanisme du quotient. En effet, dans le cas où vous percevez des revenus exceptionnels en raison de leur montant, vous pouvez appliquer un lissage afin d’atténuer votre imposition.
Le mécanisme du quotient pour la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est soumis à 3 conditions cumulatives strictes.
Premièrement, le contribuable doit avoir eu un revenu fiscal de référence inférieur ou égal au seuil d'imposition à la contribution pour chacune des 2 années précédentes (250 000 € pour les personnes seules et 500 000 € pour les couples soumis à imposition commune donc).
Deuxièmement, le revenu fiscal de référence de l'année d'imposition doit être au moins une fois et demie supérieur à la moyenne des revenus fiscaux de référence des 2 années précédentes. Cette condition vise à identifier une augmentation significative des revenus.
Enfin, la troisième condition exige que le contribuable ait été assujetti à l'impôt sur le revenu en France pour plus de la moitié de ses revenus globaux (français et étrangers) au cours des 2 années précédentes. Cette condition s'applique aux revenus de même nature que ceux inclus dans le calcul du revenu fiscal de référence.
Quels sont les revenus exceptionnels concernés, qui peuvent justifier d’utiliser le mécanisme de lissage ?
Revenus considérés comme exceptionnels s'ils dépassent la moyenne des revenus imposables des 3 années précédentes :
- Remboursement d'un rachat de trimestres de retraite (pour années d'études ou années incomplètes)
- Gratification perçue par un salarié pour services exceptionnels
- Indemnité de pas-de-porte (perçue par un propriétaire)
- Versement forfaitaire unique (à la place d’une pension de retraite de faible montant)
- Indemnités compensatrices de préavis ou de congés payés
Revenus considérés comme exceptionnels quel que soit leur montant :
- Indemnité de rupture de contrat de travail (part imposable)
- Prime de mobilité
- Prime de départ volontaire
- Indemnité de départ volontaire en retraite ou mise à la retraite
Optimiser son patrimoine pour minimiser l'impact de la CEHR
Une optimisation fiscale – dans le cadre légal – peut vous permettre de réduire le montant dû via la CEHR. Cette optimisation peut prendre plusieurs formes.
Vous pouvez par exemple privilégier des placements générant des revenus non imposables ou bénéficiant d'une fiscalité avantageuse, comme certains contrats d'assurance-vie ou les Plans d'Épargne Retraite (PER). L'investissement dans l'immobilier locatif avec des dispositifs tels que le Pinel ou le Denormandie peut également permettre de réduire l'assiette imposable grâce aux déductions fiscales associées. Une piste que je ne recommande pas, les dispositifs de défiscalisation via l’immobilier n’ont pas vraiment ma sympathie. J'ai d'ailleurs un article complet pour vous aider à avoir de nouvelles idées, avec 16 solutions pour défiscaliser et réduire ses impôts.
Je recommande plutôt une planification minutieuse de la réalisation des plus-values sur plusieurs années pour vos placements (compte-titres, PEA) pour lisser vos revenus et éviter les pics d'imposition.
Les dividendes, intérêts et loyers étant intégrés au revenu fiscal de référence, ils sont directement soumis à cette contribution supplémentaire. Cette réalité doit vous pousser à reconsidérer vos choix d'allocation d'actifs.
- Privilégiez les investissements générant des plus-values à long terme plutôt que des revenus réguliers, car les plus-values peuvent bénéficier d'une fiscalité plus avantageuse et offrent plus de flexibilité dans le timing de leur réalisation.
- Intéressez-vous aux stratégies de capitalisation, notamment via des contrats d'assurance-vie multi-supports, gagnent en attractivité car elles permettent de différer l'imposition.
L'effet de la CEHR sur la valorisation des actifs, particulièrement pour les entrepreneurs et dirigeants d'entreprise, est également à comprendre. Cette imposition accrue peut influencer vos décisions de distribution de dividendes. Certains dirigeants peuvent être tentés de limiter les distributions pour éviter de franchir les seuils de la CEHR, ce qui peut avoir un impact sur la politique de rémunération des actionnaires et, par extension, sur la valorisation de l'entreprise.
Par ailleurs, lors de la cession d'une entreprise, la CEHR peut significativement réduire le gain net réalisé par le cédant. Vous devrez alors peut-être réaliser des opérations de cession de manière à étaler la plus-value sur plusieurs années, voire à privilégier des montages impliquant des holdings pour optimiser la fiscalité de la transaction. En restant, je le répète, dans le cadre légal.
Enfin, en ce qui concerne la transmission du patrimoine, la CEHR à, la encore, des conséquences non négligeables. En réduisant le revenu disponible, elle limite mécaniquement la capacité à constituer un patrimoine transmissible. Il peut donc être judicieux d’anticiper les transmissions, avec des dispositifs de donation du vivant, permettant de profiter des abattements fiscaux renouvelables tous les 15 ans. Le démembrement de propriété ou l'utilisation de sociétés civiles est aussi une piste à suivre.
Comme nous venons de le voir, l'impact de la CEHR va bien au-delà d'une simple augmentation de la charge fiscale. Cette contribution influence selon moi profondément les stratégies d'investissement, la structuration des revenus et les décisions de transmission patrimoniale. Elle doit, si vous y êtes soumis, vous pousser à l'action. Une approche proactive et stratégique de la gestion de votre patrimoine devient capitale. Préparez-vous à changer vos stratégies d'investissement, en privilégiant peut-être des placements générant des plus-values à long terme plutôt que des revenus réguliers, ou en explorant des options d'investissement bénéficiant d'une fiscalité avantageuse.
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