Mieux vaut-il acheter ou louer sa résidence principale ? Qui n’a jamais entendu que louer son logement, c’était jeter de l’argent par les fenêtres en enrichissant le propriétaire ? Mais est-ce vraiment une bonne idée de devenir propriétaire de sa résidence principale ? En fait, la réponse n’est pas évidente et acheter sa résidence principale peut être une des pires décisions d’investissement.
Pourtant, les Français sont de plus en plus propriétaires de leur résidence principale : en 1955, 40 % des ménages français étaient propriétaires. En 2023, ce chiffre est passé à 57 % !
Alors, comment choisir ? Quelle option faut-il privilégier ?
Dans cet article, je vous propose :
- la comparaison complète et chiffrée entre acheter ou louer sa résidence principale (avec tout pris en compte, rentabilité, charges, coût d’opportunité, etc.) ;
- un exemple d'utilisation du simulateur acheter et louer sa résidence principale ;
- l’analyse comparative d’un bien en location et d’un bien à l’achat sur la ville de Montpellier ;
- les avantages et inconvénients d’acheter et de louer sa résidence principale ;
- et pour finir, un petit conseil que les agents immobiliers ne vous diront jamais.
Acheter ou louer sa résidence principale : quel est le plus rentable ?
Le cas de l’achat de sa résidence principale
Acheter un logement peut générer de grosses pertes. Vous allez payer des taxes et des charges qui vont être totalement perdues. On appelle ça des coûts irrécupérables.
Commençons déjà avec les pertes réalisées la 1re année.
Par exemple, j’ai trouvé un logement de 71 m2, un T3 à Montpellier, à Antigone, un quartier très proche du centre-ville. Le prix du logement est de 299 000 € hors frais, 71 m2, un prix au mètre carré à 4 211 €. Pas de travaux à faire ici.
Premièrement, vous pourrez payer des frais d’agence qui représentent en moyenne 5 % du prix du bien. Partons sur le fait qu’on passe en direct avec le propriétaire, donc il n’y aurait pas de frais d’agence à payer.
Deuxièmement, vous allez payer des frais de notaire qui s’élèvent entre 7 % à 8 % du prix du bien pour un logement ancien. Ici donc, autour de 24 000 €.
Troisièmement, si vous avez fait appel à un courtier en prêt immobilier, vous allez payer des frais de courtage : entre 1 % et 3 % du montant du projet. Dans notre cas, nous ne faisons pas appel à un courtier.
Ici, avec l’exemple du logement à 299 000 €, le coût total de l’opération à avancer la 1re année est de 322 920 €. Si vous souhaitez revendre votre bien plus tard, il faudra essayer de le revendre à plus de 322 920 € pour couvrir ces frais, soit 4 548 € le m2.
Vient ensuite la question du financement. Très généralement, vous allez emprunter de l’argent à la banque. La banque va alors vous faire payer des intérêts sur votre emprunt, mais aussi des frais de dossier et l’assurance du prêt.
Le paramètre taux d’intérêt est primordial dans le calcul du coût du crédit. Entre 2015 et 2022, les taux d’intérêt étaient très faibles. En octobre 2021, le taux moyen était à 1,03 %. Mais dès 2022 avec le retour de l’inflation et la hausse des taux de la Banque Centrale Européenne, les taux ont bondi jusqu’à un taux moyen à 4,21 % en novembre 2023, un taux élevé, mais qu’on a déjà connu voire dépassé dans les années 90 et les années 2000. Aujourd’hui, le taux moyen est autour de 3,7 %.
Pour que vous soyez financé, les banques vous demanderont généralement un apport de votre part. Le montant est compris entre 10 % et 20 % du prix du bien immobilier (pour les frais de notaire). Dans l’exemple, j’ai pris 10 %, donc 29 900 €. Le montant emprunté sera donc de 293 020 €, soit le coût total de l’opération diminué de l’apport. Attention, dans cet exemple, l'appartement acheté n'est pas meublé, il faudra donc rajouter une enveloppe supplémentaire.
Prenons un taux à 3,7 %, auquel il faut ajouter les frais d’assurance du prêt à payer tous les mois. Le taux de prime d’assurance dépend de votre emprunt immobilier, de sa durée, du niveau de garantie que vous prenez, de votre âge, de votre état de santé, etc. Le montant peut vraiment varier. J’ai pris pour l’exemple un taux moyen de 0,3 %. Ce qui signifie que vous allez payer 74 € d’assurance chaque mois. J’ai donc un taux global de 4 % (3,7 % d’intérêts et 0,3 % d’assurance). J’emprunte sur 25 ans, ce qui porte mes mensualités à payer pour le prêt à 1 571,80 € par mois.
En plus de cela, vous allez payer des frais de dossier à la banque : environ 1 % du montant emprunté. Ce qui porte le coût total de l’emprunt à 181 509 €. Voilà un des coûts irrécupérables les plus importants pour l’achat d’un bien immobilier.
Si on regarde l’échéancier du prêt, tous les mois vous allez peu à peu rembourser du capital, faisant baisser progressivement les intérêts à rembourser. Quand vous allez rembourser le capital, vous ne perdez pas d’argent, car vous devenez propriétaire en remboursant votre dette. En revanche, quand vous payez une assurance, ça, c’est de l’argent irrécupérable. Vous payez tous les mois l’assurance 74 € qui est généralement calculée sur le montant initial emprunté, mais n’évolue plus ensuite.
Si on étudie l’échéancier de l’emprunt, on voit que les annuités restent fixes chaque année. On paye toujours les mêmes mensualités, donc les mêmes annuités, tout au long des 25 ans. Au début, on rembourse beaucoup plus d’intérêts que de capital. Puis, cette tendance s’inverse progressivement, surtout vers la fin, où on rembourse beaucoup moins d’intérêts, car il reste moins de capital à rembourser. L’assurance, elle, reste constante.
À présent, si on observe les 25 années de remboursement, on constate qu’au tout début, environ 38 % de notre mensualité est consacrée au capital, environ 57 % aux intérêts, et environ 5 % à l’assurance. On rembourse de plus en plus de capital, ce qui réduit progressivement la part des intérêts à payer.
Au bout du compte, sur les 25 années, nos mensualités auront servi à 62 % à payer le capital, à 33 % à payer les intérêts, et à 4,7 % à payer l’assurance.
Évidemment, vous pouvez télécharger ce tableur gratuitement et y insérer vos propres paramètres. Par exemple, le taux d’emprunt : si vous réussissez à obtenir un taux de 2 % plus tard, vous verrez que cela réduit automatiquement le coût du crédit. Si, au contraire, les taux augmentent et que vous mettez ici 5 %, cela rajoute énormément de coûts irrécupérables avec donc beaucoup plus…
D’autres coûts irrécupérables vont s’ajouter pour votre résidence principale. Chaque année, vous devez payer la taxe foncière. Elle dépend de plusieurs paramètres, car il faut estimer la valeur locative du bien. À Montpellier, la taxe foncière est en moyenne de 19 €/m2. Je prends donc ici 1 349 € de taxe foncière.
Mais cette taxe foncière peut augmenter. Pour la suite de nos calculs, nous allons dire que la taxe foncière augmente de 2,5 % par an (elle suit l'inflation).
Ensuite, vous allez payer les charges non locatives :
- l’assurance de l’immeuble ;
- les honoraires du syndic ;
- des charges en tout genre si vous êtes propriétaire d’une maison ;
- des travaux d’entretien ;
- des gros travaux comme le ravalement de façades, le remplacement du toit, etc.
Dans l’exemple, je prends 2 230 € de charges annuelles et 1 000 € de travaux par an.
Le vrai coût futur des travaux est évidemment difficile à estimer. Notre simulateur prend aussi en considération un taux annuel de revalorisation des charges et travaux à payer. J’ai pris 2 % par an, ça reste conservateur, quand on voit parfois l’emballement de certains prix.
Pour calculer l’ensemble des coûts irrécupérables dus à l’acquisition de votre résidence principale, et ce sur 25 ans, on additionne donc :
- la taxe foncière chaque année et revalorisée à 2,5 % par an ;
- les charges et travaux revalorisés à 2 % par an ;
- les frais d’agence ;
- les frais de notaire ;
- les frais de courtage ;
- le coût total de l’emprunt (intérêts, assurance et frais de dossier).
Au total, c’est 354 966 € de coûts irrécupérables sur 25 ans.
Si on analyse maintenant votre enrichissement, au bout de 25 ans, vous êtes devenu pleinement propriétaire de votre résidence principale. Combien vaudra-t-elle dans 25 ans ?
Prenons une estimation de l’appréciation annualisée de votre bien immobilier de 3 % par an. Vous serez alors propriétaire d’un bien à 607 805 €. Si vous vendez ce bien, vous n’aurez d’ailleurs aucune fiscalité, car vous serez exonéré au titre de résidence principale.
Votre enrichissement net sur 25 ans sera alors de 607 805 € moins 354 966 € de coûts irrécupérables, soit un enrichissement de 252 838 €.
Voilà donc ce qu’il se passerait si vous deveniez propriétaire. Au lieu d’être propriétaire, que se passerait-il si vous deveniez locataire ? Et si, en étant locataire, à la place de faire un apport pour votre bien immobilier, vous utilisez les mêmes flux de trésorerie, mais pour payer votre loyer et placer le reste dans des investissements fructueux ?
Le cas de la location de sa résidence principale
Toujours à Montpellier et dans le même quartier, à Antigone, j’ai trouvé un appart à la location d’une superficie équivalente, 74 m², le coût du loyer est de 1 125 € par mois : 990 € de loyer et 135 € de charges et il y a 970 € d’honoraires à payer à l’agence.
J’indique ces données dans le simulateur. À noter que du côté du locataire, c’est le loyer et les charges qui peuvent augmenter de la part de votre propriétaire, en moyenne de 2 % par an. Le loyer charges comprises atteint alors dans 25 ans 1 809 € par mois.
L’argent que vous payez mensuellement à votre propriétaire, vous ne le reverrez jamais. Si l’on reste pendant 25 ans dans ce logement, que le loyer augmente de 2 % chaque année, cela revient à donner 432 409 € à son propriétaire.
C’est donc un coût irrécupérable, qui, ajouté aux honoraires de l’agence, porte l’ensemble des coûts irrécupérables pour le choix de la location de sa résidence principale à 433 379 €. Dans cet exemple aussi il faudra rajouter une enveloppe pour financer les meubles.
Pour calculer l’enrichissement net du locataire par rapport au propriétaire de sa résidence principale, il faut maintenant considérer que le locataire fait travailler l’argent qu’il n’utilise pas.
Le propriétaire a dû lui sortir la 1re année :
- 53 340 € à cause de l’apport de 29 900 € ;
- la 1re année de mensualités du crédit à 18 861 € ;
- 1 349 € de taxe foncière ;
- 3 230 € de charges et travaux.
Le locataire lui n’a sorti de sa poche que 14 470 € : 1 an de loyer et les honoraires de l’agence. Le locataire a donc à disposition 38 870 € de plus que le propriétaire qu’il peut investir.
La 2e année, il a 9 768 € de plus que le propriétaire qu’il peut aussi placer. Ainsi de suite. La 25e année, il a 4 782 € à placer par rapport au propriétaire.
En considérant que le locataire sait placer cette trésorerie à une performance annuelle de 5 % net en investissant en SCPI ou en Bourse, il aura un capital final net au bout de 25 ans de 478 572 €.
L’enrichissement net du locataire est alors de 478 572 € – 433 379 € de coûts irrécupérables. Soit un enrichissement net de 45 193 €.
En comparant l’enrichissement net du locataire et du propriétaire, on obtient le graphique ci-dessous.
Au début, le propriétaire est beaucoup moins riche que le locataire parce qu’il a payé des frais et des coûts irrécupérables d’entrée bien supérieurs à ceux du locataire. Le locataire, quant à lui, commence avec de la trésorerie disponible, ce qui lui donne un enrichissement net positif. En effet, tout ce que le propriétaire a perdu, le locataire peut l’investir, payer son loyer et les honoraires, puis investir la différence.
On constate qu’au bout de 18 ans, le propriétaire devient plus riche que le locataire. Cela est dû à l’enrichissement grâce à l’effet de levier réalisé sur sa résidence principale, soutenu par la banque. Au début, le propriétaire paye beaucoup d’intérêts, ce qui rend l’enrichissement difficile. Cependant, lorsqu’il commence à rembourser une part importante du capital, il devient de plus en plus propriétaire de sa résidence principale, compensant ainsi les frais payés par rapport au locataire qui stagne. Toutefois, le locataire parvient à s’enrichir légèrement grâce à ses placements de trésorerie sur les 25 années.
Vous pouvez télécharger le tableur et ajuster les paramètres à votre convenance.
Par exemple, vous pourriez estimer que le bien immobilier ne s’appréciera pas forcément à 3 % par an, mais plutôt à 2 %. De même, la taxe foncière pourrait s’apprécier davantage avec le temps. Ici, nous avons utilisé un taux de 3 %. Vous pourriez aussi prévoir plus de travaux pour le propriétaire sur 25 ans, car un bien immobilier peut se dégrader et nécessiter des réparations importantes. Imaginons un taux de 4 % d’augmentation annuelle pour ces travaux.
D’un autre côté, le locataire pourrait investir à un taux de 5 à 6 % sur 25 ans. Supposons un taux de 6 %. En comparant l’enrichissement net du locataire à celui du propriétaire avec ces paramètres, on constate alors que le locataire se trouve dans une meilleure situation que le propriétaire.
Dans cette simulation, il est essentiel de noter que ces calculs sont basés sur plusieurs hypothèses. Chaque situation individuelle peut différer. Je vous invite donc à télécharger notre simulateur « acheter ou louer sa résidence principale » que je viens d’utiliser en cliquant sur l’onglet ci-dessous. C’est un outil qui va vous aider à savoir si vous devez acheter ou louer votre résidence principale ? Vous pourrez remplir tous vos propres paramètres et obtenir la comparaison chiffrée précise en quelques clics.
Voilà donc tout le dilemme : être propriétaire et payer les coûts irrécupérables associés (intérêts, assurance, travaux, taxe foncière, etc.), mais profiter de l’effet de levier du crédit. Ou être locataire, avoir aussi de nombreux coûts irrécupérables, mais pouvoir placer plus de trésorerie excédentaire.
À noter évidemment qu’une autre option est de rester locataire et d’utiliser l’effet de levier pour un investissement locatif ou de l’investissement en SCPI, ce qui peut être une décision très rentable aussi.
Cette comparaison montre toutefois 2 choses :
- Premièrement, être propriétaire n’est pas forcément une meilleure option qu’être locataire au niveau de la rentabilité. En tout cas, ce n’est pas aussi net que ce qu’on pourrait croire. On a parfois cette pensée simpliste que le propriétaire s’enrichit tandis que le locataire s’appauvrit. En fait, si le locataire gère bien sa trésorerie et si son loyer est relativement bas par rapport au prix d’achat du bien immobilier (cela dépend des villes), à la taxe foncière et à tous les coûts irrécupérables associés à l’achat d’une résidence principale, il peut bien s’en sortir en termes d’enrichissement sur la durée. En plaçant sa trésorerie, il peut même avoir moins de problématiques et de charge mentale à gérer de son côté.
- Deuxièmement, le plus important dans cette histoire, finalement, c’est d’investir. Le pire scénario, c’est un locataire qui n’investit ni en immobilier, ni en Bourse, ni ailleurs, ce qui signifie qu’il n’y a aucun retour sur son capital. Il est devenu indispensable aujourd’hui de se constituer un patrimoine au fil du temps avec une bonne stratégie d’épargne et d’investissement.
Évidemment, le choix entre louer ou acheter sa résidence principale n’est pas seulement financier.
Les avantages et les inconvénients d’acheter sa résidence principale
Il existe 4 grands avantages majeurs à acheter une maison ou un appartement pour y vivre :
- Le sentiment de sécurité, car la pierre est perçue comme une valeur refuge qui peut donc prendre de la valeur avec le temps.
- La stabilité, car vous avez la sécurité de ne pas être contraint de déménager à cause de décisions du propriétaire ou de trop fortes hausses de loyer.
- La liberté de personnalisation étant donné que vous pouvez effectuer des travaux quand et comme vous le souhaitez.
- La sécurité financière puisque vous vous constituer un patrimoine pour votre retraite, vos enfants, et en cas de revente êtes exonérés de taxation sur la plus-value.
Mais acheter sa résidence principale comporte aussi son lot d’inconvénients :
- les coûts irrécupérables, comme vus plus tôt ;
- La nécessité d’avoir un apport
- l’engagement envers la banque sur une durée longue (20 ans, 25 ans avec des dettes) ;
- la perte de flexibilité et de mobilité de pouvoir changer de logement quand vous le voulez si vos besoins en matière de logement changent (comme l’arrivée d’enfants ou une mutation) ;
- la perte de capacité d’endettement si vous achetez votre résidence principale avec des mensualités qui représentent ⅓ de vos revenus, vous serez très certainement bloqué après cet emprunt, vous ne pourrez pas faire d’autres emprunts immobiliers ;
- le risque de ne pas revendre au prix auquel vous avez acheté votre bien (en 2023, le marché de l’immobilier est par exemple en baisse de 5 % au global en France) ;
- le risque aussi de liquidité en ne trouvant pas d’acheteurs immédiatement.
Avantages | Inconvénients |
Le sentiment de sécurité | Les coûts irrécupérables |
La stabilité | L'engagement envers la banque sur une longue durée et la perte de flexibilité |
La liberté de personnalisation | Le risque de ne pas revendre au prix et le risque de liquidité |
La sécurité financière | La perte de capacité d'endettement |
En bref, acheter ou louer sa résidence principale dépend vraiment du contexte et des objectifs de chacun. Enfin, un dernier conseil que les agents immobiliers ne vous diront sûrement jamais : ne vous laissez pas influencer par les médias annonçant régulièrement « c’est le moment d’acheter ». Ces déclarations visent souvent à inciter à des décisions précipitées. Les médias et certains acteurs du marché répètent ces assertions chaque année, créant une fausse urgence.
Pour prendre une décision éclairée, basez-vous sur des analyses objectives et des données solides, et évaluez votre situation financière personnelle, les tendances du marché local et les prévisions économiques avant de choisir entre acheter ou louer. Pour vous aider, je vous invite à télécharger gratuitement le simulateur « acheter ou louer sa résidence principale ».