L’intelligence artificielle anime de nombreux débats depuis quelques mois. Pourtant, elle ne date pas d’hier. Face à cette montée en puissance de l’IA et tous ces bouleversements technologiques, économiques et même sociaux à venir, il est légitime de s’interroger.
Vous vous demandez si ce n’est pas le moment de vous positionner sur de cette tendance ? Vous craignez de manquer le train si vous n’investissez pas sur des actions ou des ETF de l’intelligence artificielle ? Alors, nouvelle ruée vers l’or ou pas : voici mon avis.
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Connaître l’histoire de l’intelligence artificielle
Nous sommes en 1951 : Dietrich Gunther Prinz programme le jeu d’échecs sur le 1er ordinateur électronique généraliste commercialisé au monde. Il s’agit d’un Manchester Ferranti. Arthur Samuel développa lui dès l’année suivante un jeu de dames capable d’apprendre. C’est un des 1ers programmes d'auto-apprentissage réussis au monde et une démonstration très précoce du concept fondamental de l'intelligence artificielle.
L’évolution de l’IA dans le monde
40 ans plus tard, en 1997, le superordinateur Deep Blue développé par IBM spécialisé dans le jeu d’échecs bat le champion du monde de l’époque : Garry Kasparov. Celui-ci déclara d'ailleurs que Deep Blue est un adversaire extraterrestre aussi intelligent que votre réveil.
C’est vrai que jusqu’alors, les intelligences artificielles étaient spécialisées dans un domaine très précis. Elles étaient centrées, par exemple, sur le jeu de dames, les échecs, le jeu de go avec AlphaGo, etc. D’ailleurs, ce dernier a battu les meilleurs joueurs de Go au monde dans les années 2010. À l’instar du réveil qui sonne à 7 heures précises chaque matin si telle est sa mission, les intelligences artificielles excellaient jusqu’à présent dans leurs spécialités uniquement.
Cela était vrai jusqu'à l’avènement de l’intelligence artificielle généraliste. Cette forme d’IA n’excelle plus dans un seul domaine de spécialisation, mais elle est capable d’apprendre et de devenir spécialiste de tout. Elle s’apparente en quelque sorte à un être humain sur ce point.
L’arrivée des intelligences artificielles généralistes
À moins d’avoir vécu à l’écart de la civilisation au cours de ces derniers mois, vous avez forcément dû entendre parler du phénomène ChatGPT. Il a réussi le tour de force de dépasser la barre des 100 millions d’utilisateurs actifs mensuels en 2 mois seulement. Cette performance fait de lui l’application grand public à la croissance la plus rapide de l’histoire.
L’IA derrière ChatGPT est une IA forte, une IA généraliste. Vous pouvez aussi bien poser des questions de développement informatique à ChatGPT que de cuisine, de littérature ou de droit. ChatGPT-4 a d’ailleurs fait mieux que 90 % des candidats à l’épreuve d’entrée pour devenir avocat aux Etats-Unis, ou encore à des examens de biologistes et de sommeliers.
ChatGPT, comme MidJourney d’ailleurs, est une IA générative. Elles sont capables de vous créer du contenu unique, du texte n’existant pas avant, des images nouvelles, originales et pertinentes, chose qu’on pensait réservée jusqu’ici aux êtres humains.
OpenAI, l’entreprise qui se cache derrière ChatGPT, est maintenant valorisée à 29 milliards de dollars après un investissement de 10 milliards de la part de Microsoft. ChatGPT n’est pas la seule boite d’intelligence artificielle à être valorisée à plus de 1 milliard de dollars. C’est même la partie émergée de l’iceberg de l’intelligence artificielle, puisqu’actuellement on dénombre des centaines d’outils génératifs équivalents. On comptabilise aussi et surtout des milliers et des milliers de programmes d’intelligence artificielle privés dans divers secteurs : santé, éducation, finance, industrie, etc. L’intelligence artificielle représente aujourd’hui une nouvelle dimension en constante évolution, un peu comme une nouvelle partie de Minecraft où tout reste à construire.
Investir sur la tendance de l’intelligence artificielle
2 ETF pour investir en Bourse ont beaucoup fait parler d’eux à leur lancement. L’ETF Social Sentiment, aussi appelé l’ETF BUZZ du fonds de gestion ****VanEck et le Roundhill Ball Metaverse ETF de Roundhill Investments.
La tendance des ETF BUZZ et ETF METAVERSE
L’ETF BUZZ, lancé le 2 mars 2021, cherche à répliquer le cours des 75 actions de grandes entreprises américaines ayant le sentiment d’investisseur le plus positif et les perspectives les plus optimistes, en se basant sur des contenus en ligne comme les réseaux sociaux, les articles de presse et les blogs. En d’autres termes, l’ETF VanEck Social Sentiment tente de surfer sur les tendances pour dénicher la prochaine entreprise qui explosera !
Pour le 2d, l’ETF « Metaverse » est lancé le 30 juin 2021. Il est conçu pour suivre les actions d’entreprises qui développent, soutiennent ou tirent profit du Metaverse et de ses technologies sous-jacentes, comme Meta, Roblox, Nvidia, ou encore Microsoft.
La performance des ETF BUZZ et ETF MÉTAVERSE
Maintenant, si on s’intéresse à leurs performances respectives, on s’aperçoit qu’investir sur des tendances n’est pas forcément la meilleure idée. Depuis sa création, l’ETF Buzz de VanEck affiche une performance annualisée de -21,8 %, tandis que le S&P 500 atteint 4,5 % sur la même période.
Buzz vs S&P
Pour l’ETF « Metaverse », c’est bien pire. Depuis son lancement, l’ETF enregistre une performance de -37,7 %. Je me souviens que lorsqu’il était sorti, tous les réseaux en parlaient et j’avais même reçu des questions dessus. Heureusement, cet ETF n’était pas disponible pour les Européens.
Moralité, est-ce vraiment pertinent de suivre aveuglément les tendances populaires ?
En tout cas, même si les performances sont médiocres, ce ne sera jamais pire que le fonds ARKK Innovation de Cathie Wood. Celui-ci représente 7 milliards de dollars et -70 % de performance sur la même période. Il cherche pourtant à investir sur les entreprises d’innovation de rupture.
Il existe aussi des ETF pour investir sur l’Intelligence artificielle comme le Amundi Stoxx Global Artificial Intelligence ou le Xtrackers Artificial Intelligence & Big Data.
Mais, on le sait, les nouvelles tendances qui émergent sur les marchés financiers sont souvent victimes de phénomènes bien connus de tous. Cependant, ils n’ont de cesse de se répéter au cours de l’Histoire.
Comprendre le concept des stocks et des bulles spéculatives
On a tous déjà entendu parler de la bulle Internet et de son éclatement au début des années 2000. Celle-ci a fait chuter le NASDAQ de plus de 78 % de sa valeur et conduit à la faillite de nombreuses entreprises du secteur technologique. Elle a également engendré des pertes financières catastrophiques pour les investisseurs.
Bulle internet années 2000
Les nouvelles tendances et les phénomènes de modes sont légion au cours de l’Histoire économique et financière. Vous avez peut-être déjà entendu parler de la tulipomanie au XVIIe siècle aux Pays-Bas, de la South Sea Company, ou encore de la bulle des chemins de fer, la Railway mania au milieu du XIXe siècle.
Ou alors, plus proche de nous, l’emballement des shitcoins, des projets NFT avec la bulle sur les NFT qui a éclaté fin 2021 et avec 99 % de volumes en moins depuis, ou aussi du Metaverse. Ce genre de hype suscite l’enthousiasme des investisseurs, qui provoque à son tour une agitation des marchés financiers.
C’est notamment ce qui peut se produire lorsque l’on investit dans les « concept stocks », les entreprises à concept, innovantes, dans l’ère du temps qui bénéficient d’un effet de mode et d’un joli storytelling.
À la fin des années 90, de nombreuses entreprises se renommaient en .com ou en .net pour faire monter leurs cours de bourse alors qu’elles faisaient peut-être du jardinage. De la même manière, BuzzFeed a annoncé un partenariat avec Meta et ChatGPT et son cours a explosé de 307 % à la hausse avant de retomber de -73 % depuis.
C’est là est tout le piège pour les investisseurs particuliers : se laisser tenter par des « concept stocks », du storytelling, par l’envie d’argent rapide et de performance.
C’est ce qu’on appelle l’effet « bandwagon » en anglais ou le wagon avec l’orchestre. Cela signifie toujours vouloir sauter dans « le dernier wagon où joue l’orchestre » pour suivre la tendance de la majorité. Mark Twain disait : « Chaque fois que vous vous retrouvez du côté de la majorité, il est temps de vous arrêter et de réfléchir. »
Réaliser que l’IA est une bulle spéculative comme un autre
Alors, l’IA est-elle comme beaucoup de tendances, une hype et un engouement excessif à éviter pour les investisseurs ? Ou faut-il tout de même se positionner dessus ?
Alors, il est vrai que certaines applications liées à l’Intelligence artificielle peuvent être présentées comme de simples tendances médiatiques, dont la pérennité reste incertaine à long terme. En revanche, l’intelligence artificielle représente un ensemble beaucoup plus vaste et profond. Il s’agit d’innovations en train d’envahir à peu près tous les secteurs d’activité et des pans entiers.
Secteurs touchés par l'IA
Un peu à l’image du virage digital qu’ont pris les sociétés autour des années 2000/2010, il est probable que certaines entreprises réfractaires aux outils dopés à l’IA perdent en compétitivité. Cela se fera au profit de celles qui auront su s’y positionner.
Selon un rapport du cabinet de conseil Accenture publié en 2017, on estime à plus de 14 mille milliards de dollars, l’augmentation du PIB mondial d’ici l’horizon 2035. Il est également attendu un accroissement de la productivité au travail de plus de 40 %. Pour PwC, l’un des Big Four de cabinets de conseils internationaux, c’est plus de 15,7 mille milliards de dollars d’augmentation du PIB mondial d’ici 2030.
Évidemment, on le sait, certains cabinets peuvent s’emballer ou avoir des intérêts à promouvoir l’IA. Il est tout de même vrai que l’intelligence artificielle aura un impact économique majeur, parce que c’est tout simplement déjà le cas. On espère au passage que l’IA sera aussi mise à profit pour des causes nobles, comme la lutte contre le dérèglement climatique, pourquoi pas.
Mais pour autant, côté investisseur, si vous souhaitez vous bâtir un patrimoine solide sur le long terme, prendre un biais dans votre portefeuille sur l’Intelligence artificielle n’est probablement pas pertinent, et ce pour 3 raisons.
Tendances ne rime pas avec performance en Bourse
Premièrement, avoir un portefeuille de « trend-chaser » ou de « chasseur de tendances » ne fera pas de vous un meilleur investisseur.
D’ailleurs ce n’est pas souvent synonyme de meilleure performance, au contraire. Si vous devez faire fructifier votre patrimoine en investissant en Bourse, vous n’avez pas besoin de saisir chaque tendance de marché. Vous feriez même mieux d’éviter de tomber dans ce piège.
Si vous essayez de jouer à ce jeu, vous aurez investi dans le DogeCoin, les SPACS, les NFT, le Metaverse. En gros, votre portefeuille serait celui d’un influenceur trading sur tiktok et vos rendements ressembleront à ceux du fonds de Arkk Innovation.
L’intelligence artificielle va se trouver dans toutes les entreprises
Deuxièmement, l’IA est en train de devenir une couche de technologie sur laquelle toutes sortes de logiciels seront construits. Ne craignez pas de manquer le train de l’IA. Il n’y a pas besoin de se positionner directement dessus puisque finalement la majorité des entreprises prennent ou prendront le tournant.
Microsoft détient en partie OpenAI et ChatGPT. Apple développe des IA notamment pour SIRI. Meta et Mark Zuckerberg veulent booster leurs réseaux sociaux à l’IA. Google a lancé son propre chatbot IA nommé Bard et a les meilleurs ingénieurs du domaine. Les GAFAM ont massivement augmenté leur recrutement de talents dans ce secteur.
Mais surtout, une enquête récente de The Economist menée auprès de 3 000 managers a révélé que plus de la moitié de leurs entreprises (57 %) prétendent déjà expérimenter ou déployer de l’intelligence artificielle. Une majorité (59 %) déclare avoir une stratégie en matière d’IA, et 70 % affirment comprendre le potentiel de cette technologie pour générer de la valeur. Autrement dit, vous avez probablement déjà de l’IA dans votre portefeuille.
La nouvelle startup de l’IA peut vitre être dépassé
Troisièmement, sélectionner la nouvelle startup d’IA aujourd’hui pourrait fonctionner, mais vous prenez le risque important d’investir dans Blockbuster Video plutôt que Netflix, dans Yahoo plutôt que Google, dans Blackberry plutôt qu’Apple. Même des entreprises pionnières comme OpenAI avec ChatGPT pourraient être rapidement dépassées par des concurrents plus innovants.
À long terme, il est bien plus efficace d’adopter une approche sensée et raisonnée plutôt que de suivre les dernières tendances d’investissement. Plutôt que de paniquer et d’avoir le FOMO, je pense que nous devrions simplement être optimistes quant à ces nouvelles technologies à venir, sans chercher à prendre un biais d’investissement dessus.
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Matthieu Louvet